samedi 6 octobre 2007

S'intégrer



Ça fait plusieurs jeudis après-midi que j'ai le ventre à l'envers sans trop savoir pourquoi… Je m'en doutais, mais je n'avais pas mis vraiment le point dessus!

Je m’explique; les jeudis après-midi sont consacrées aux rencontres informelles entre mamans suite aux rendez-vous officiels du CLSC ("Maman et bébés s’amusent").

J’avais toujours quelque chose qui se pointait le jeudi PM et je n’allais pas au point de rencontre… J’aurais pu y aller à deux ou trois reprises de plus que prévu, mais je me désistais à la dernière minute! Mais pourquoi?

Je vous jure, j’avais le ventre à l’envers, la tête étourdie, le cœur chaviré et j’ai finalement compris pourquoi…

Tout d’abord, rien à voir avec les mamans, la maternité et le concept de ces rencontres; strictement rien!

Pourquoi? Et bien, Geneviève allait aux rencontres sans aucun autre rôle que d’être elle-même!

Je ne suis pas l’employée ou la collègue de travail, je ne suis pas la bénévole, l’animatrice, l’amie, la sœur; je suis Geneviève l’être social!

Quelle nudité et frayeur!

Depuis ma première année scolaire, j’avais dans le corps de difficiles et déchirantes heures à la maternelle : je devais confronter la dure réalité de ne plus être à la maison, dans le nid tout doux et chaud auprès de ma mère.

Une étape qui a toujours été quelque peu traumatisante pour moi.

Comme tous ces dimanches soir où le cafard m’empoignait au cou en me volant littéralement, le calme et l’amour si suave du cocon familial.

Une déchirure constante que d’aller à l’école le lundi matin!

Une fois, soudainement prise par l’immense peine d’être là, je me suis mise à pleurer en pleine classe et l’enseignante qui n’avait pas suivi son cours de « psycho 101 » et/ou n’avait tout simplement pas de tact, a proclamé tout haut devant toute la classe :

« Ahhhh… Bon… Voilà, Geneviève qui pleure comme un bébé! »

« PAUVRE CONNE! OUI, OUI, PAUVRE CONNE !!! »: QUE JE CRIS MAINTENANT TOUT HAUT!

Vous savez, « madame la professeur », vous auriez pu aisément me prendre de côté, seule à seule et me dire que vous compreniez ma peine au lieu de me ridiculiser!

Comme j’ai appris à le faire avec les touts petits que j’anime le vendredi matin : « Je comprends ta peine, maman va revenir tout à l’heure, viens, on va s’amuser! »

Quand j’ai dit ça la première fois la semaine passée, j’avais quasiment le goût de pleurer avec le petit qui tenait fermement son manteau et son minuscule sac à dos afin de partir au plus vite.

J’aurais voulu pleurer aussi fort que lui, voyant si clairement son désarroi… Mais je lui ai tout simplement dit que je le comprenais... « oh que oui; je te comprends mon beau! »

« Madame la professeur » : Est-ce que vous savez combien de fois, vous avez mis en péril mes premières interactions avec un nouveau groupe de personnes?

Toutes les fois ma chère dame et ce, avec douleur et tristesse imprégnées dans tout le corps!

Imaginez-vous, on est en septembre et j’ai encore 6 ans à me taper à l’école primaire Ste Marguerite, 6 ans d’éternelles interactions; la base de ma nouvelle vie sociale!

Pour moi, ma relation avec le reste de la classe était foutue; j’avais l’air de quoi maintenant ?!?!?!

Le bébé, la faible, ; c’est certifié, officiel, garanti; le professeur l’avait dit comme une leçon à retenir à tout jamais!

Évidemment mes collègues de classe ne se sont sûrement pas souvenues de cette leçon, mais moi je traînais le poids de cette supposée conséquence!

La paranoïa et la douleur de cette remarque me hante jusqu’à ce jour, de moins en moins puissamment, mais je lutte toujours.

Bizarrement ce genre de « pattern » qu’on traîne en nous est ancré dans notre corps comme un réflexe qu’on a peine à changer!

J’ai beaucoup travaillé à cesser de penser que les autres me jugeaient sans me connaître : face à un nouveau groupe, je commençais toujours mon interaction avec les autres dans la certitude que j’étais plus ou moins intéressante; quel dommage!

Je remercie encore ma mère qui a engueulé mon professeur, merci maman de m’avoir défendu mais il était déjà trop tard!

Akim, je te souhaite d’avoir de bons professeurs, de bons guides; ils ou elles seront les premières bases de ta vie sociale.

Moi d’ici ce temps, je consolerai d’autres petits, j’écouterai d’autres ados; je rachèterai ma prof, à ma manière!

Finalement, jeudi dernier, je suis allé à la rencontre informelle des mamans, j’étais étourdi, mais je me suis efforcé de parler aux autres pour m’apercevoir, toujours si naïvement surprise avec mes yeux de petite fille… « Et bien coudonc, ça a tout l’air que je peux être intéressante pour les autres! »

Les efforts que je ferai de fois en fois avec de nouveaux groupes me donneront enfin la certitude que je suis quelqu’un de bien à connaître… Ce dont je doute tant, tant de fois, sans le vraiment le désirer, vous savez!

Je vois la lumière qui se pointe; lentement mon corps reprend le dessus.

3 commentaires:

Anny a dit…

Ma belle Geneviève!
mon premier commentaire!
Tes histoires me touchent autant chaque fois... je suis contente que tu sois allée!
Je t'embrasse et pense souvent souvent souvent à toi.
xxxxxxx

Anonyme a dit…

coucou, devines quoi, je vis quelque chose de similaire...à croire que je te copie!!!En bref, je me suis parfois fait dire que j'étais silencieuse, comme si je n'avais rien à dire...ou bien on me disais que je ne racontais pas d'histoires drôles ou de blagues, donc d'autres que moi étaient plus intéressants...à certains moments de ma vie, je travaille encore sur ces aspects...et je m'isole lorsque cela arrive. Le pas que tu fais en ce moment est important, tu défends ton cri, ta vision et ta vie ( Richard Séguin)...bonne soirée

Anonyme a dit…

Chère Geneviève,



Je t’ai lue en fin de semaine. Tu luttes encore pour ton estime. Tu es encore paralysée. Tu en parles. Tu trouves écho. Je t’admire d’oser d’aller jouer dans le trafic.

Je veux tout simplement corriger le rapport que tu fais de mon attitude vis-à-vis ta maîtresse d’école. Ce n’est pas ma façon d’agir que d’engueuler les personnes.

J’ai plutôt déploré sa maladresse en souhaitant un changement pour le bien de ma fille. A-t-elle vraiment changé ? Toi seule pourrait me le dire.



Tu le sais que je crois en toi, en tes possibilités. Avance dans ta vie, tu es une bonne mère. Profites des beaux sourires d’Akim. Ta famille est importante.

Sois heureuse. Tu es une femme intéressante.



Bons baisers de ta mère



Pauline