je te sens désamparée et remplie de désirs d'avancer.
Tes souvenirs d'ici sont omniprésents; pourquoi avoir quitté en fait ton univers montréalais?
Toi seule, le sait.
Tu as voulu te bousculer, répondre à des questions que tu n'oses pas répondre ou simplement te poser? Ton confort de fin de séjour fait contraste à l'indifférence de ce début de voyage.
Tout comme à chaque début, excluant ceux qui demandent d'être vécu urgemment (partir à tout prix par besoin quelconque par exemple), chaque début est donc difficile.
Qui sommes-nous dans ce pays, ces paysages, ces moeurs? À qui peut-on s'associer, qui nous guette, qui nous scrute, qui nous plaît, qui nous font fuir?
Déshabilles-toi de tes façons de faire, tu peux être Autre, différente, personne ne te connaît, profites de cette occasion pour essayer tout ce que tu veux... Permets-toi de perdre un temps fou dans cette adaptation.
Si tu as des êtres chers et des lieux montréalais qui restent gravés en toi, amènes les avec toi, ne les fuis pas. Ils sont là, je suis là; fais moi découvrir ton nouveau monde. Plus le temps passera moins nous serons lourds à porter.
Comme Akim, tout jeune, tu sauras un beau matin, sourire comme par enchantement puisque tu sauras te sentir maintenant confortable... même dans un panier de linges sales!
Nous devriendrons tes compagnons au lieu de tes fantômes. Et si ça te prend une autre semaine, un autre mois (ou deux ou... peu importe); on s'en fout, chacun son rythme, chacun sa façon.
Je me rappelle avoir combattu trop longtemps (presque 2 mois!) mon amour pour Mao, le désir d'être avec lui lorsque j'étais au Mali, à devoir, en plus guider mes stagiaires dans ce blues de chacune de leur vie personnelle... La guide en moi trouvait la tâche plus qu'ardue! J'aurais dû assumer mon manque de mon Mao au lieu de me juger que je trouvais si dommage d'avoir la tête ailleurs!
Alors voilà.. Je te laisse sur deux citations qui j'espère, t'accompagneront... comme moi!
Je t'embrasse, xxx
« Je crois à la vertu des absences. Après tout, au bout de trois mois d’absence, tout ce qui agaçait votre famille proche s’évanouit – les tics, le fait que vous ne remettiez pas un objet où l’autre le met, ces petites choses qui rendent la vie désagréable. Vous-même rentrez changé et vous ne remettez pas forcément l’objet à l’endroit où vous le mettiez avant. Vous trouvez une solution plus satisfaisante. Des petites améliorations naissent de très longues absences. Il y a aussi le fait qu’elles vous permettent de faire votre compte. Vous vous dites : sur tel ou tel point, je n’ai pas été très juste ou : je devrais être plus attentif à telle chose à mon retour. Dans une vie de couple qui passe toujours par des crises shakespeariennes, il faut d’immenses lucarnes, des bouffées d’air salubre. »
Nicolas Bouvier, Routes et déroutes
«Un jour, on demanda au Dalaï Lama : " Qu'est-ce qui vous surprend le plus dans l'humanité?"
Il répondit : "Les hommes qui perdent la santé pour gagner de l'argent et qui, après, dépensent cet argent pour récupérer la santé. A penser trop anxieusement au futur, ils en oublient le présent, à tel point qu'ils finissent par ne vivre ni au présent ni au futur. Ils vivent comme s'ils n'allaient jamais mourir et meurent comme s'ils n'avaient jamais vécu".
Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu'il se suffit à lui-même. On croit qu'on va faire un voyage, mais bientôt c'est le voyage qui vous fait, ou vous défait ( ... ) La piste est très solitaire, de grandes distances séparent les villages. Pour une raison ou une autre, il peut arriver qu'on arrête la voiture et passe la fin de la nuit dehors. Au chaud dans une grosse veste de feutre, un bonnet de fourrure tiré sur les oreilles, on écoute l'eau bouillir sur le réchaud à l'abri d'une roue. Adossé contre une colline, on regarde les étoiles, les mouvements vagues de la terre qui s'en va vers le Caucase, les yeux phosphorescents des renards. Le temps passe en thés brûlants, en propos rares, en cigarettes, puis l'aube se lève, s'étend, les cailles et les perdrix s'en mêlent ... et on s'empresse de couler cet instant souverain comme un corps mort au fond de sa mémoire, où on ira le rechercher un jour. On s'étire, on fait quelques pas pesant moins d'un kilo, et le mot "bonheur" paraît bien maigre et particulier pour décrire ce qui arrive ... Finalement ce qui constitue l'ossature de l'existence, ce n'est ni « les loisirs », ni la carrière, ni ce que d'autres diront ou penseront de vous, mais quelques instants de cette nature, soulevés par une lévitation plus sereine encore que celle de l'amour, et que la vie nous distribue avec une parcimonie à la mesure de notre faible coeur.»
Nicolas Bouvier, L’usage du monde
Je le dis, je le répète, Akim est mon voyage à moi, il a bousculé dans ce que j'étais avant, avec mon quotidien. J'ai pris du temps à ASSUMER qu'il avait affecté ma liberté si chérie. Comme lui dans ce panier, tu sortiras de tes souvenirs pour découvrir ce qui est devant toi et te l'approprier.
Je t'embrasse encore et à tantôt! xxx
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire